Le projet Killing Me Softly prend pour matière première un ensemble de morceaux (6 au total) qui ont marqué l’histoire de la musique du 20ᵉ siècle et dont la popularité a généré un nombre incalculable de reprises (covers) en ligne sur le web. Conçue en multipiste, l’installation présente le télescopage, l’accumulation et la concentration d’une quinzaine de reprises pour un seul standard, et donne à entendre un enchâssement choral et un embouteillage sonore qui noie la chanson originale. Le tempo de chaque morceau (souvent différent pour chaque version) n’a pas été modifié en étirant la longueur et le pitch du morceau, mais seulement coupé et replacé pour le synchroniser à la version originale.
Si l’intention qui préside à chaque production de covers est bien celle de l’appropriation, de la différentiation et de l’individualisation, menée dans une compétition acharnée du plus grand nombre de vues, elle apparait aussi comme un des symptômes le plus criant de la démocratisation des homes studios et de l’apprentissage par tutoriels, où chacun peut tenter sa chance dans le bal des interprétations plus ou moins standardisées encore possibles. Cette masse d’individuations ainsi rassemblée dans un seul corps laisse apparaître une cacophonie engluée et pâteuse issue de réseaux saturés d’autant d'existences tentant de s’en extraire.
Performance longue durée (avec Lea Breitschmid)
Il s’agit ici de se connecter en streaming live aux émissions du jour d’un flux radiophonique (radio généraliste) sans distinctions ni connaissance préalable des programmes, durant 10 heures d’affilée et de muter (par l’intermédiaire d’une tierce personne) la parole des intervenants et invités des émissions (experts politiques, psychologues, économistes, artiste… ) et de répondre à leur place, en projetant autant de réponses possibles, sans tomber dans l’écueil de la parodie.
À l’heure de l’IA généralisée et du concept de post-vérité, que valent encore les paroles d’un individu vis-à-vis d’une question pointue ? Que nous apprennent vraiment les expert.e.s invité.e.s sur des médias généralistes (et les contraintes d’accessibilité pour le plus grand nombre qui s’y rapportent)? Y a-t’il, en dépit d’une spécialisation accrue dans son domaine, la possibilité de connaître un sujet, évitant les biais subjectif et intégrant toute la complexité du monde?
C’est la notion d’expertise humaine qui est mise en jeu dans cette performance où se dévoileront en direct acrobaties rhétoriques plus ou moins convaincantes et tentatives d’auto-légitimation
Né en 1980
Basé à Sion
Maximilien Urfer est un artiste dont la pratique expérimentale se déploie à travers une grande diversité de médiums : vidéo, photographie, peinture, écriture, performance, installation et son. Ses œuvres explorent principalement les questions d’identité, de langage mimétique, de contextes et les notions de point de vue. Il utilise fréquemment son propre corps comme médium, explorant des formes narratives hybrides où la vidéo devient un outil d’archivage.
Cette alternance de pratiques sans liens apparents nourrit une forme d’ambivalence qu’il revendique comme une méthode de permaculture artistique. Son ateliers regorge d’instruments de musique, témoignant de l’importance de la musicalité et de l’improvisation dans sa démarche.